Chronique du 26 septembre 2012
L’ASCE et la lutte contre la corruption
Le jeudi 13 septembre 2012, Son Excellence Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement, Beyon Luc Adolphe Tiao a effectué une visite dans les locaux de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat. Il a, à cette occasion, réaffirmé sa détermination et l‘engagement de son gouvernement à lutter contre la corruption. Pour ce faire, il a annoncé des mesures énergiques contre la mal gouvernance et pour une meilleure gestion des deniers publics dans notre pays. C’est le lieu de découvrir ou de redécouvrir l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat, cette institution investie du rôle de vigile des deniers publics et de fer de lance de la bonne gouvernance au Burkina Faso.
L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat (ASCE) a été créée par la loi n°03262007 /AN du 29 novembre 2007. Elle est née de la volonté des plus hautes autorités de notre pays à lutter contre la corruption et la mal gouvernance sous toutes ses formes et de leur ferme détermination, à faire de cet organe de contrôle, un outil efficace et performant de promotion de la bonne gouvernance.
L’ASCE est un organe de contrôle d’ordre administratif. Elle a préséance sur tous les autres organes de contrôle administratif. Elle est placée sous l’autorité du Premier ministre. Son contrôle s’exerce sur les institutions de l’Etat, les missions diplomatiques à l’étranger, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, les établissements publics de l’Etat, les sociétés d’économie mixte, les projets et programmes de développement et les personnes morales de droit privé assurant la gestion d’un service public ou bénéficiaire du concours financier, de l’aval ou de la garantie de la puissance publique.
Après seulement quatre années d’existence, l’Autorité supérieure de contrôle de l’Etat s’est imposée comme la garante et la vigile de la bonne utilisation des ressources publiques. Elle a permis de faire d’énormes progrès dans la lutte pour la bonne gouvernance et pour la moralisation de l’administration publique burkinabè. Ce qui a valu au Burkina Faso d’être souvent cité dans les différents rapports des organismes de promotion de la bonne gouvernance et de lutte contre la corruption.
La publication des quatre rapports généraux annuels d’activité de l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat (2008, 2009, 2010 et 2011) et sa forte médiatisation , les nombreuses missions de contrôle, le suivi régulier de la mise en œuvre des recommandations issues des investigations et de l’évolution des dossiers dont la justice est saisie, la sanction systématique des gestionnaires indélicats, et les nombreuses missions de sensibilisation, d’information et de formation effectuées par l’institution, ont grandement contribué à asseoir son image de marque et à lui obtenir la compréhension et l’adhésion du public burkinabè et des partenaires techniques et financiers dans son combat pour la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, en même temps qu’elle installait définitivement le contrôle dans les mœurs des gestionnaires des biens publics.
A la faveur de la volonté politique des plus hautes autorités et suite aux recommandations des évaluations du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP) et de celles du programme pilote d’évaluation de la mise en œuvre de la Convention des Nations unies contre la corruption dont le Burkina Faso a fait l’objet, des réformes législatives et institutionnelles sont entreprises.
Il s’agit notamment :
– de la relecture en cours, du code pénal pour prendre en compte les insuffisances relevées au regard de la Convention des Nations unies contre la corruption ;
– de la relecture de la Politique nationale de lutte contre la corruption ;
– du renforcement des capacités des inspections techniques des services au niveau de tous les départements ministériels, chargés du contrôle du fonctionnement des services de l’Etat ;
– de la mise en œuvre de nouvelles approches d’audit, notamment celles basées sur les risques, l’objectif étant de disposer de cartographies des risques dans les départements ministériels ;
– de la soumission prochaine d’autres catégories de personnes soumises à l’obligation de déclaration des biens et du suivi de l’exécution de cette obligation par l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat.
Autant d’actions qui ont convaincu les plus sceptiques de la volonté du gouvernement à lutter contre la corruption et ont permis et favorisé l’instauration de la culture de l’obligation de rendre compte. Ces acquis ont été obtenus non sans le renforcement du dispositif du système de contrôle, de la dynamisation et la professionnalisation des corps de contrôle, notamment des Inspections techniques des services (ITS). Cela s’est concrétisé par de nombreuses formations, et de multiples soutiens en matériels logistiques (véhicules, carburants, ordinateurs etc.) qui ont permis de renforcer les capacités opérationnelles et techniques de ces inspections. De même, un cadre de concertation des organes de contrôle de l’ordre administratif auquel participent la Cour des comptes et les autres corps de contrôle a été institutionnalisé à l’occasion duquel un accent particulier est mis sur le renforcement des capacités des contrôleurs d’Etat et des inspecteurs généraux et techniques des services des départements ministériels à travers des formations.
Ce qui se traduit sur le terrain par une meilleure harmonisation des actions de contrôle et par une meilleure coordination technique de l’ensemble des organes de contrôle. Elle se traduit aussi par plus de professionnalisme, et plus d’efficacité lors des missions de contrôle. Une meilleure gouvernance des ressources financières de l’Etat s’est instaurée.
Pour preuve, on constate un plus grand respect de la règlementation. Ainsi, une lutte plus acharnée a été menée contre l’utilisation des biens publics, notamment les branchements sauvages d’électricité, les consommations irrégulières d’eau dans les administrations et l’utilisation abusive des véhicules de l’Etat. Et chose inédite, la saisine de la Justice par l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat en cas d’infraction commise par rapport aux textes législatifs et réglementaires en matière de gestion des biens et des finances publics s’installe dans les habitudes.
Après quatre années d’existence sur le terrain, l’ASCE a bien fait ses preuves, et a su par ses résultats, mériter la confiance de nos plus hautes autorités et des partenaires techniques et financiers du Burkina Faso. Elle a su convaincre l’opinion nationale qu’au lieu d’actions spectacles, la lutte contre la corruption est un combat de longue haleine qui requiert l’adhésion et la contribution de tous.
Des résultats encourageants notés en 2011
Au cours de l’année 2011 l’ASCE a mené des activités de contrôle de conformité et de régularité qui ont permis de constater une baisse sensible des montants des détournements de fonds et des manquants de caisse par rapport aux années précédentes. On peut donc sans conteste, affirmer que l’une des résultantes pédagogiques de l’action de l’ASCE au fil des années, est la peur du gendarme que cela a suscitée chez les gestionnaires des fonds publics.
En dépit de cette amélioration notable de la gestion des finances publiques, beaucoup reste à faire ; le combat doit s’intensifier notamment au niveau des dépenses non justifiées.
En matière de lutte contre la corruption, outre les missions de contrôle et d’investigation, l’année 2011, à l’instar des années précédentes, a connu des réalisations de missions de sensibilisation, d’appui-conseil et des rencontres d’échanges entre l’ASCE et les autres acteurs de la lutte contre la corruption.
C’est ainsi que toute l’année 2011 a été marquée par un certain nombre d’ateliers et de réunions organisés par l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et entrant dans le cadre du processus participatif d’adoption du Document de politique nationale de lutte contre la corruption auxquels ont participé des représentants de l’Administration, des partenaires techniques et financiers, du secteur privé et de la société civile.
Ce processus a abouti en janvier 2012, à l’adoption consensuelle du Document de Politique nationale de lutte contre la corruption et de son plan d’actions, et qui prévoit un cadre de concertation entre l’ASCE et la société civile pour une meilleure synergie dans la lutte contre la corruption ;
Au cours de l’année 2011 et dans le cadre de son programme d’activités 2012, l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat a initié plusieurs campagnes de sensibilisation sur la lutte contre la corruption dans les ministères, les régions, les écoles de formations professionnelles, et a tenu des rencontres de concertation avec les différents acteurs étatiques et non étatiques impliqués dans la lutte contre la corruption dont des représentants du secteur privé, du REN-LAC, du réseau des parlementaires burkinabè pour la lutte contre la corruption « BURKINDI », du Réseau des journalistes pour l’intégrité et la transparence (RAJIT) etc. La dernière rencontre du genre est l’atelier sur la corruption co-organisé par l’ASCE et l’ENAREF et animé par M. Mario Dehove de la Cour des comptes française. Cet atelier qui a eu lieu du 24 au 27 avril 2012 au Centre d’enseignement à distance de Ouagadougou (CEDO), a été un moment de riches débats entre les différents participants (administration, finances, douanes, justice, secteur privé, société civile, REN-LAC, CGD, BURKINDI, syndicats). Il en sera d’ailleurs tiré un film documentaire.
C’est dans ce cadre aussi qu’il faut situer l’atelier d’information et de sensibilisation sur la lutte contre la corruption et les infractions assimilées organisé au profit des journalistes. Cet atelier a regroupé des journalistes de l’ensemble des médias de notre pays et a permis aux participants de renforcer leurs capacités techniques à traiter les dossiers relatifs aux activités de l’ASCE en général et à la lutte contre la corruption en particulier ;
La Journée internationale de lutte contre la corruption le 9 décembre a été commémorée les 8 et 9 décembre 2011 à Bobo-Dioulasso (Région des Hauts-Bassins) sous le thème « Corruption, tous pour le Non ». Elle a connu plusieurs activités de sensibilisation dans la lutte contre la corruption.
L’ASCE a élaboré avec l’appui technique et financier de la Banque mondiale, un Manuel de procédures de gestion des dénonciations et des plaintes (MPGDP) ;
Ce manuel qui a été validé en décembre 2011 avec la participation du secteur privé et de la société civile, a pour objet de permettre la constitution et la gestion concertée d’une base de données homogène, cohérente et pertinente des dénonciations et des plaintes. Il est applicable pour compter du 1er janvier 2012 à l’ensemble des activités de gestion des dénonciations et des plaintes reçues par l’ASCE et les autres membres et partenaires du cadre de concertation des organes de contrôle de l’Etat de l’ordre administratif.
L’ASCE est actuellement en train d’élaborer avec la contribution exemplaire de l’administration, du secteur privé, de la société civile et des partenaires techniques et financiers un Système national d’évaluation de l’indice de corruption ;
Du côté du gouvernement, une réflexion est en train d’être menée sur la création de pôles financiers au niveau de la Justice pour permettre un traitement plus professionnel et plus diligent des dossiers de corruption et de détournements de fonds et de biens publics ;
A tout ceci, il faut ajouter la journée de concertation qui a eu lieu le 14 février 2012 entre le ministère de l’Economie et des Finances et le RENLAC et qui avait pour objectif de partager les expériences, d’instaurer un partenariat entre les deux structures en vue de la mise en place d’un cadre formel de collaboration. Elles se sont aussi accordées à cette occasion sur la mise en place d’un dispositif anti-corruption au sein du ministère de l’Economie et des Finances.
Ce fut l’occasion pour le ministre de l’Economie et des Finances de faire le point des actions de lutte contre la corruption, la fraude et le faux au sein de son département, et de présenter au REN-LAC les structures de lutte anti-fraude et anti-faux qui existe au sein de son département comme la coordination nationale de lutte contre la fraude (CNLF), la Cellule nationale de traitement des Informations Financières (CENTIF), la Brigade mixte de contrôle impôts-douanes (BMC), la Direction des enquêtes douanières etc.
Après le contrôle… le suivi de la mise en œuvre des recommandations et des actions en justice
Le suivi de la mise en œuvre des recommandations constitue une étape logique et importante du processus de contrôle de régularité et de conformité. C’est l’une des activités les plus importantes de l’ASCE. Il a pour objectif principal de vérifier si les problèmes décelés au cours du contrôle ont été résolus. Il permet d’améliorer l’efficacité des rapports de contrôle et d’éviter la persistance des dysfonctionnements dont les conséquences peuvent s’aggraver avec le temps.
Le suivi de la mise en œuvre des recommandations offre, en outre, l’occasion de vérifier l’évolution du contexte de la structure contrôlée et de s’assurer que les recommandations sont toujours pertinentes au jour du suivi.
La vérification de la mise en œuvre effective des recommandations formulées dans les rapports de contrôle de l’ASCE et dans ceux des inspections techniques des services des départements ministériels s’est déroulée au cours de l’année 2011 selon les modalités de suivi sur place et de suivi sur pièces.
Cette mission de suivi de mise en œuvre des recommandations est dévolue au département qui est aussi chargé du suivi des actions en justice. Mais au final, il faut rappeler, qu’il revient en premier lieu à chaque département ministériel ou à chaque institution d’assurer la mise en œuvre des recommandations le concernant.
En ce qui concerne le suivi des dossiers en justice, il est à noter qu’au nom du sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la justice, le rôle de l’ASCE se limite à ce niveau au seul suivi de l’évolution des dossiers transmis à la justice, sans interférence dans le travail de celle-ci.
S’inspirer des expériences des autres structures au plan international
Au niveau international, L’ASCE recherche de plus en plus fréquemment les meilleures pratiques étrangères dans le cadre de ses missions. Ainsi, des missions de l’ASCE en propre ou mixtes ont eu par exemple des séances de travail avec des Organisations de la société civile, la Représentation de la Banque mondiale, la conférence de l’UnionfFrancophone de l’audit Interne (UFAI) qui s’est tenue à Ouagadougou du 14 au 16 novembre 2011, l’Office des Nations unies contre le crime et la drogue en Autriche, l’Inspection générale des Finances du Maroc, la Cour des comptes du Cap Vert, la Brigade spéciale anti-corruption du Burundi et l’Inspection générale du gouvernement de l’Ouganda. Ces visites ont permis non seulement de visualiser les différences d’organisation et de fonctionnement, mais également de recueillir auprès des principaux opérateurs, un grand nombre d’informations indispensables à l’analyse. Ces rencontres ont été des occasions de nouer des relations de confiance et de partenariat avec les interlocuteurs étrangers de tous niveaux et de renforcer nos capacités. La quête d’excellence et de professionnalisme sont des valeurs que nous avons intégrées dans notre institution et que nous nous attachons à appliquer pour obtenir une institution efficace et forte.
Autorité Supérieur Contrôle d’Etat/Premier Ministère